Le divertissement sécuritaire

Pour « prévenir les violences à l’école », la mise en œuvre des contrôles aléatoires aux abords des établissements a commencé, avec un fort écho médiatique.

Cette action représente l’opérationnalisation par le gouvernement de la proposition de loi « visant à protéger l’école de la République et les personnels qui y travaillent », adoptée en première lecture au Sénat le 6 mars dernier, qui intègre la possibilité de fouille par les personnels de direction et CPE.

Sous couvert de renforcement de la protection des personnels, le texte engendre une révision des fonctions des personnels de direction et CPE qui n’est pas sans conséquences sur la relation éducative. Confondant les rôles entre forces de l’ordre et personnels de direction, il fragilise le contrat de confiance entre l’institution scolaire, les élèves et leurs parents. En privilégiant l’affichage sécuritaire au détriment du besoin de renforcer l’accompagnement social et éducatif, ces dispositions œuvrent à l’inverse de l’objectif visé et font courir le risque de renforcer les tensions au sein des établissements. 

La mise en scène opérée par les ministres de l’Education nationale et de l’Intérieur n’est pas moins problématique. L’action publique s’y résume une fois de plus à la vacuité d’une stratégie de communication où l’incarnation de l’Etat se dégrade en parades de carnaval. Comme les pantomimes ministérielles, les déploiements des forces de l’ordre aux abords des établissements relèvent de la politique spectacle. Ils participent de la figuration plus que d’une réelle mesure de sécurité.

Une communication à gros sabots, qui ne s’embarrasse pas de la constructions de  protocoles concertés, n’a rien à voir avec la préparation d’un terrain qui favorise la sécurité des EPLE tout autant que le respect des principes républicains. Les établissements prioritaires sont les cibles majoritaires, quasi « naturelles » de ces contrôles. Ce ciblage pourrait alimenter des amalgames d’autant plus dérangeants qu’on prétend les faire au nom des « valeurs de la République ». Il pose également la question délicate du glissement vers des critères implicites de sélection des élèves concernés par ces fouilles aléatoires. Les chefs d’établissements devront-ils assumer les « aléas » d’un contrôle policier qui peuvent se révéler discriminatoires ?

Mais que nous soyons amenés à faire les frais d’une politique à la fois cynique et superficielle paraît indifférent.

Dans un contexte où sont mis en lumière des manquements de l’Education nationale dans le contrôle des établissements privés sous contrat sur les violences sexistes et sexuelles, la priorité semble être de saisir l’opportunité du thème des violences à l’école pour allumer des contre-feux. Et tant qu’à faire, au prix de la stigmatisation des établissements qui sont des symboles du service public.