Loi de transformation de la Fonction publique :

Mort du paritarisme et précarisation des emplois en vue ?

L’actualité braque les projecteurs sur la Réforme des retraites. Nous vous proposons un focus sur la Loi de transformation de la Fonction publique, votée le 6 août 2019. Elle va métamorphoser littéralement nos conditions de travail, le rapport avec les équipes enseignantes. Mais pas seulement. Nous-mêmes, nous sommes directement concernés par la précarisation de nos emplois.

Même si le mouvement de grève contre la Réforme de la Fonction Publique contrecarre l’agenda du gouvernement, il ne faut pas oublier pour autant les textes discutés pendant l’été dernier. La loi de la transformation de la Fonction Publique, votée par le Parlement le 6 août 2019, explicite par son titre l’idéologie du gouvernement : réduire la voilure, faire des économies. Ou disons les choses de manière plus claire : casser la Fonction Publique.

Pour en reprendre les éléments de langage, ce texte permet, « transformer et simplifier la gestion des ressources humaines ». Le recours à un lexique managérial doit plutôt être lu comme une antiphrase. En effet, la section 1 permet d’« élargir le recours au contrat » : « A l’exception des emplois supérieurs relevant du décret mentionné à l’article 25 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, des emplois de directeur général des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée et des emplois relevant des 1° et 2° de l’article L. 6143-7-2 du code de la santé publique, le recrutement d’agents contractuels pour pourvoir des emplois permanents est prononcé à l’issue d’une procédure permettant de garantir l’égal accès aux emplois publics. Un décret en Conseil d’État prévoit les modalités de cette procédure, qui peuvent être adaptées au regard du niveau hiérarchique, de la nature des fonctions ou de la taille de la collectivité territoriale ou de l’établissement public ainsi que de la durée du contrat. L’autorité compétente assure la publicité de la vacance et de la création de ces emplois. » Autrement dit, comme nous pouvons le faire lorsque nous participons nous-mêmes à des commissions de recrutement pour des agents des collectivités territoriales, lors d’une vacance de poste, nos postes de direction pourront également être ouverts à une bourse d’emplois et nous pourrons être en concurrence avec des personnels contractuels qui postuleront.

Si l’on en était pas bien convaincu, c’est ce que précise l’article 18 qui précise que « 2° Les emplois des établissements publics de l’Etat, sous réserve des dispositions du code de la recherche pour les agents publics qui y sont soumis ; » L’article 21 ajoute l’élément suivant : « Le fonctionnaire à temps non complet dont l’emploi est supprimé ou dont la durée hebdomadaire d’activité est modifiée bénéficie, en cas de refus de l’emploi ainsi transformé, d’une prise en charge ou d’une indemnité compte tenu de son âge, de son ancienneté et du nombre d’heures de service hebdomadaire accomplies par lui. « Un décret en Conseil d’Etat précise les conditions d’application du présent article, notamment les dérogations à la présente loi rendues nécessaires par la nature de ces emplois. »

Mutations 2020 : le snU.pden-FSU peut défendre votre situation, on vous explique

Comme cela ne suffisait pas, les règles du paritarisme ont été totalement redessinées. Les commissions administratives paritaires voient leur champ de compétences réduites. A compter de 2020, elles n’auront plus la possibilité d’examiner le mouvement des personnels en amont et d’alerter l’administration des erreurs possibles avant la publication du mouvement. Tout fonctionnaire, personnels de direction compris, devra, s’il souhaite contester la décision de l’administration, signer un mandatement dans lequel il désigne une organisation représentative en comité technique ministérielle.

Autrement dit, même si le snU.pden n’a pas d’élu en CAPN, en tant que syndicat affilié à la FSU, il a désormais la possibilité de défendre votre situation personnelle[1].

C’est une révolution qui rebat les cartes de l’ensemble des syndicats, quelles que soient les catégories professionnelles. L’accompagnement syndicale se fera donc de gré à gré et non plus par effet de cohorte, comme cela c’était le cas auparavant. Ce principe du mandatement signifie également que le fait d’être syndiqué ne suffit plus à attester du fait que vous pouvez être défendu par un syndicat. Concrètement, le mandatement produit fera foi auprès de l’administration.

A partir de 2021, cette réforme touchera également la carrière et les promotions des collègues.

Lignes directrices de gestion, de quoi parle-t-on ?

Ces opérations de gestion sont orientées par les « lignes directrices de gestion » (LDG) définies par le ministère de l’Éducation Nationale et déclinées dans les académies.

Concernant la mobilité 2020, les LDG affirment des principes que nous revendiquons mais que nombre de collègues ne reconnaissent pas dans l’application des procédures, telles que :

  • « le MENJ organise des procédures transparentes … »
  • « des éléments de départage sont définis. Ces éléments prennent en compte les priorités légales de mutation prévues par l’article 60 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la Fonction Publique de l’État.

Ainsi, dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées tiennent compte des demandes formulées par les intéressés au titre des critères de priorité suivants :

  • Demandes liées à la situation familialeRapprochement de conjoints
    • Demandes liées à la situation personnelle
      • Fonctionnaire, conjoint ou enfant du fonctionnaire en situation de handicap
      • Situation des personnels sollicitant la reconnaissance du Centre de leurs Intérêts Matériels et Moraux (CIMM)
    • Demandes liées à leur affectation actuelle
      •  Agents affectés dans un établissement relevant de l’éducation prioritaire (REP +, REP, établissement relevant de la politique de la ville).
    • En outre, des éléments complémentaires sont pris en compte pour départager les candidats comme la prise en compte des anciennetés notamment la durée d’affectation sur un poste et, pour les personnels de direction, de l’évaluation professionnelle.
    • Enfin, le traitement des demandes tient compte de l’avis des recteurs.

L’application effective de ces critères, dans l’ordre de publication, constituerait une avancée pour la gestion de la mobilité au sein de notre corps. Ces orientations ministérielles doivent être appliquées dans les phases de préparation du mouvement au niveau académique.

L’affirmation de procédures transparentes ne doit pas constituer une simple déclaration d’intention mais être effective. Le ministère et les rectorats doivent donner aux organisations syndicales les moyens d’évaluer, après chaque phase de mutation, le respect de ces critères et de leur hiérarchisation. Le snU.pden-FSU l’exigera, avec la FSU, dans les différents comités techniques académiques et ministériel.

Malgré ces déclarations d’intention, ne nous laissons pas leurrer. La philosophie générale du gouvernement est claire : économie à tous les étages. Le recours aux contrats, y compris dans les emplois de cadres de la Fonction Publique ne va certainement pas arranger les choses. Pire : elle place les personnels dans l’incertitude face aux futures mobilités, avec la possibilité de voir son emploi disparaître ou réservé par l’administration à des personnels contractuels. Il est essentiel que la profession se mobilise sur des questions, qu’elle ose poser les problèmes sur la table face aux gestionnaires de proximité. Faut-il s’attendre à des formes de népotisme ? Le snU.pden-FSU sera présent à vos côtés, pour continuer de défendre l’intérêt des personnels, les valeurs du Service Public, les principes de solidarité.

Paris, le 24 février 2020

Le bureau national


[1]Sont représentatives, au sens de l’article 14 bis de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, les organisations syndicales disposant d’au moins un siège au sein du comité social d’administration ministériel ou au sein de tout autre comité social d’administration dont relève l’agent. (Article 30, Décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l’évolution des attributions des commissions administratives paritaires)