« Peinture décorative visant à créer l’illusion d’objets réels en relief par la perspective » : telle est la définition de la technique du « trompe l’œil » (Petit Robert), telle est la technique de communication du gouvernement sur le volet Education du Projet de Loi de finance.
« Un système éducatif qui réussit et qui fait réussir repose sur des fondations solides » (M. Blanquer en préambule de la présentation du PDLDF) : qui peut être en désaccord avec ces propos ?
Mais :
Combien d’entre nous redoutent le moment de l’annonce de la prochaine DGH et des réductions de moyens basés sur des prévisions d’effectifs curieusement annoncés à la baisse par services des Rectorats ?
Combien d’entre nous ont le sentiment de passer un temps, une énergie considérable à monter des dossiers, remplir des formulaires, répondre à des injonctions de dernière minute sur des applications peu ou pas intuitives (et qui bloquent tellement souvent) ?
Combien d’entre nous ont le sentiment que le quotidien des EPLEs, dans ses tâches le plus élémentaires se détériore faute d’un nombre suffisant de personnels, de professeurs non remplacés, de classes surchargées ?
Combien d’entre nous ont le sentiment de voir sa feuille de paye se réduire de mois en mois (où est la « revalorisation substantielle » annoncée ?) ?
Au final, combien d’ entre nous ont le sentiment que ces « fondations solides » se fragilisent chaque année davantage ?
Ne soyons pas rassurés car derrière :
- un catalogue de dispositifs (certes intéressants) de mesures catégorielles, tous basés sur une contractualisation épuisante et chronophage, sur des redéploiements d’emplois entre 1er et 2nd degré, entre catégories de personnels,
- des annonces à grand renfort de communication rassurante auprès du grand public,
Le budget qui s’annonce, s’inscrit dans la lignée des précédents avec son cortège de dégradations de ses « fondations solides » pourtant appelée de ses vœux par notre ministre. Il en est ainsi de la ponction de 350 emplois d’enseignants pour abonder ceux « hors enseignement », du recours accru aux heures supplémentaires pour « économiser » des ETP notamment pour les enseignements en BTS. Et n’oublions pas que les contractuels voient leur part augmenter à l’EN, où ils occupent 22% des emplois.
L’ingestion de l’École Publique (vous savez : laïque, gratuite, obligatoire), de ses valeurs, de sa dimension nationale dans « un grand système public d’Éducation » qui englobe l’enseignement privé sous contrat (très largement confessionnel), qui externalise de plus en plus de prestations (le pass-culture est géré par une société par action simplifiée), qui renforce les compétences des collectivités territoriales continue son chemin à vitesse forcée.
Quand on s’approche trop près d’un « trompe l’œil », on voit qu’il n’est que beauté apparente, qu’illusion et que platitude.
Bruno Baire,
Membre du bureau national