Le décès de Mélanie Grapinet invite à l’émotion et à la tristesse. Au-delà de ses proches, des personnels et toute la communauté éducative du collège Françoise Dolto, ce sont aussi tous les personnels de l’éducation nationale qui sont affectés par ce drame, tout particulièrement les assistants d’éducation.
Mais l’événement à peine survenu, il fallait de toute urgence occuper le terrain médiatique au-delà de la bienséance. Entre tweet présidentiel et annonces choc où vraisemblance et applicabilité sont mises entre parenthèses, c’est à qui dégainera le plus vite la mesure la plus tapageuse : interdiction « immédiate » de la vente d’armes blanches, généralisation des portiques, renforcement des contrôles aléatoires… tous égrènent le même chapelet sécuritaire. La différence n’est pas qualitative dans ces infimes variations sur le thème, mais de quantité, de force du coup de marteau. La posture de gravité sentencieuse est partagée, la différence n’est que dans la lourdeur avec laquelle on la joue.
Il est juste un peu embarrassant pour la réitération de la peu décente parade des fiers à bras de la parole publique que cette tragédie ait eu lieu à l’occasion d’un contrôle visuel des sacs en présence de la gendarmerie, mesure phare du discours d’autoproclamation de l’école sûre et protectrice. Mais ce n’est qu’un détail, l’essentiel n’est pas là : tout est dans l’art de produire de la réassurance instantanée. Dans l’immédiateté de la réponse qui mime le volontarisme responsable, le courage de prendre enfin les mesures nécessaires : nous sommes invités à croire qu’elles relèvent de l’évidence et du bon sens bien partagé, et qu’elles n’attendaient qu’une volonté politique un peu virile pour être prises.
Nous prenons le parti de ne pas gober ce récit. Le snU.pden-FSU s’autorise à ne pas louer la « gravité présidentielle » ou la « dignité du premier ministre » dans ces circonstances tragiques. Il en va de bien autre chose que de l’agitation des plans d’action, des « trains de mesures » à sortir en urgence.
Ce n’est pas qu’il faille déprécier l’enjeu de la sécurité. Bien au contraire. Mais elle passe par une politique globale pour prendre en compte les déterminants psychiques, sociaux, politiques, institutionnels de la violence à l’école. Elle passe par une politique qui n’expose pas les personnels – et en premier lieu les assistants d’éducation, les CPE et les personnels de direction – à de tels risques du fait qu’on les oblige à des tâches de police qui n’ont rien à voir avec le cadre de leurs missions. Elle ne se trouve pas dans l’alpha et l’oméga des portiques ou des fouilles systématiques ; elle requiert d’abord un projet éducatif et pour le construire les moyens qui font actuellement scandaleusement défaut. La présence de personnels assistants d’éducation, CPE, infirmières scolaires, de personnels qualifiés pour produire autre chose que des énoncés vides ou des dispositifs conçus pour faire signe et qui ne valent en fin de compte que comme symptômes d’une apothéose du gadget. La parole sécuritaire ne fait que dissimuler cette lacune qui crie l’abandon du service public.