L’Assemblée nationale a adopté en première lecture le 5 mai 2025 la proposition de loi comportant la généralisation des Pôles d’Appui à la Scolarité d’ici septembre 2027.
Au cours de l’année scolaire 2024-2025, quatre départements – l’Aisne, la Côte-d’Or, l’Eure-et-Loir et le Var – ont expérimenté le déploiement des Pôles d’Appui à la Scolarité (PAS) en lieu et place des Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés (PIAL). A la prochaine rentrée, les PAS seront élargis sans bilan des premières expérimentations à l’ensemble des départements (deux PAS par département à partir de septembre 2025 avant une généralisation à partir de septembre 2026), un processus qui inquiète tant sur le forme que sur le fond.
Le PAS, c’est quoi ?
Enième acronyme au sein de l’Education nationale, le Pôle d’Appui à la Scolarité supplante le Pôle Inclusif d’Accompagnement Localisé : d’après la circulaire du 3 juillet 2024, il s’agit d’un « nouveau service rendu aux parents et responsables légaux d’enfants présentant des besoins éducatifs particuliers, en même temps qu’une organisation qui vient en appui des professeurs, au sein même des classes ou dans des lieux dédiés implantés dans les écoles et établissements ».
Coordonné par un binôme composé de deux personnels, d’une part un personnel de l’Education nationale placé sous l’autorité hiérarchique du DASEN ou de son représentant, et d’autre part un éducateur à temps plein déployé par l’Agence Régionale de Santé, le PAS doit assurer trois missions :
- l’identification des besoins pour tout élève rencontrant « une difficulté d’accès au savoir et aux compétences » ;
- la définition d’un plan d’action avec trois niveaux d’intervention : des aménagements pédagogiques et éducatifs ; la mise à disposition d’un matériel pédagogique adapté ; un soutien ou une prise en charge spécifique par des professionnels de l’Education nationale dont les AESH et/ou du secteur médico-social ;
- le suivi et l’évaluation
Le pilotage de l’ensemble des PAS à l’échelle départementale est assuré par le DASEN qui définit une organisation interne en lien avec le délégué territorial de l’Agence Régionale de Santé (DT ARS).
De nombreuses questions soulevées par leur mise en place
Si la reconnaissance des situations de handicap reste de la responsabilité des Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH), les réponses en terme d’accompagnement humain et de matériel pédagogique adapté relèvent dorénavant des compétences des PAS. Un tel transfert à l’Education nationale de l’évaluation des besoins des élèves en situation de handicap suit une logique strictement budgétaire : sous couvert d’une communication officielle mettant en avant des intentions d’augmentation des aides, en contournant les MDPH et l’expertise des personnels médico-sociaux, l’attribution des quotas horaires et des aides humaines par l’Education nationale s’inscrit dans la dynamique de dégradation du service public d’éducation avec une réduction des moyens dans un contexte de demande croissante en termes de besoins d’accompagnement.
Les PIAL avaient déjà consacré une dégradation de l’accompagnement via la mutualisation. La carte des futurs PAS qui se dessine petit à petit dans chaque département consacre des territoires plus vastes que les PIAL, des territoires posant ainsi la question des services et des déplacements professionnels pour les personnels AESH pour lesquels nous redoutons une précarité accrue.
Si la mise en place des PAS peut représenter une opportunité pour renforcer les coopérations avec les services de santé, il convient cependant de rester vigilants pour éviter que des “plans d’action” dictés par l’ARS ne se substituent à l’identification des besoins éducatifs spécifiques aux établissements.
Enfin le nouveau dispositif ne parviendra pas à masquer et à pallier les insuffisances croissantes en terme de personnels et de moyens dans le domaine de la santé dans de nombreux territoires (périphériques, ruraux, ultra-marins…).
Les revendications du snU.pden-FSU
Le snU.pden-FSU dénonce la généralisation d’un dispositif une nouvelle fois sans réel bilan de l’expérimentation et sans concertation avec les différents professionnels (personnels de l’Education nationale et personnels médico-sociaux) et avec les partenaires sociaux.
Dans un contexte à la fois de multiplication des situations dans les établissements, de réduction des moyens et d’absence de formation et d’accompagnement des personnels, la question des réponses à apporter aux élèves à besoins particuliers devient de plus en plus tendue : face à une situation où dans la classe il devient de plus en plus difficile pour l’enseignant de répondre au nombre et à la diversité des besoins particuliers des élèves et où la logique budgétaire ne permet pas de répondre aux besoins en terme d’accompagnement AESH, il n’est plus possible pour les personnels de l’Education nationale – et en premier lieu les personnels de direction – de tenir aux parents le discours que l’Ecole est dans la mesure de répondre aux besoins de leurs enfants.
Davantage qu’une refonte, c’est d’une confirmation du fonctionnement des PIAL comme outils de gestion d’une main d’œuvre précarisée et flexibilisée qu’il s’agit, au détriment des conditions de développement professionnel et de collaboration interprofessionnelle en faveur de l’accessibilité des apprentissages.
Sans réelle ambition transformatrice, simple aménagement de surface pour répondre en temps réel à la demande sur un “marché” de l’inclusion scolaire en pleine expansion, cette évolution du dispositif n’est pas à la hauteur des besoins d’une vraie politique d’inclusion.
C’est une toute autre politique pour l’Ecole (et pour la Santé) qui est nécessaire : une politique avec des moyens croissants, à savoir davantage de personnels, mieux formés, des effectifs moins chargés dans les classes et une véritable revalorisation du statut et des conditions de travail des personnels AESH.