RCD : le remplacement à courte vue

C’est sous l’angle moralisateur qu’est abordée la question des Remplacements de Courte Durée, affichée comme priorité ministérielle. Le discours officiel relayé par les recteurs se complaît à déplorer la situation scandaleuse de ces élèves privés de ce que l’Ecole leur doit du fait de l’absentéisme des enseignants et de l’incurie des chefs d’établissement. Mais n’est-il pas un peu trop facile de jouer la carte du scandale ?

La problématique de « l’absentéisme enseignant » peut-elle être sérieusement traitée sous cette forme d’un dispositif totémisé, celui du protocole RCD, qui prétend limiter les effets sans s’attaquer à des causes profondes qui sont liées aux conditions de travail et au fonctionnement du système ?

Le service public d’enseignement se dégrade en effet, la santé au travail se détériore parce que les politiques en cours abîment nos métiers tout autant qu’elles les dénigrent. Cette « préoccupation majeure » se montre finalement comme ce qu’elle est : une stratégie de contournement du problème lorsque des postes ne sont pas pourvus et que le ministère ne donne pas à l’Etat les moyens d’assurer ses missions.

Les postures moralisatrices dissimulent mal une profonde indifférence à l’action éducative et aux besoins fondamentaux que l’Ecole est censée satisfaire. Elles ne visent pas d’autres objectifs que ceux d’une communication politique racoleuse sur un retour à l’ordre et à la responsabilité, et qui consacre la transformation du citoyen en consommateur.

Au demeurant, le rabotage généralisé des HSE et des enveloppes Pacte n’est-il pas quelque peu contradictoire avec le claironnement des objectifs ? Qu’à cela ne tienne : le principal est dans l’enrôlement de tous les acteurs dans la stratégie de marketing, et la pression en est l’outil privilégié. Les chefs d’établissements se voient contraints par décret de participer à leur propre flicage, obligés à la présentation du protocole et à la remontée systématique. Confirmés dans un rôle d’exécutants infantilisés : comment peuvent-ils encore faire confiance à une institution dont l’autorité se dégrade en procédures de contrôle, et dans le but absurde de remplacer pour remplacer, quelle qu’en soit l’intelligence et la valeur éducative, quand la seule importance est d’affichage ?