La contre-réforme de l’Inspection Générale engagée par le gouvernement dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique, poursuit la remise en cause organisée des principes fondamentaux de la fonction publique dont ceux de la neutralité et d’indépendance au politique des fonctionnaires.
Après le décret sur la « nouvelle gouvernance académique » de 2012 qui renforce la continuité de la ligne hiérarchique Recteur – DASEN – Chef d’établissement, affaiblissant notamment la digue entre le niveau politique représenté par le Recteur et les Inspecteurs d’Académie, fonctionnaires d’État, tenus au principe de neutralité (décret dont les effets avaient été évalués dès 2013 dans un rapport de l’Inspection Générale) c’est aujourd’hui le principe d’indépendance de l’Inspection Générale qui est attaqué.
Une confusion entre le niveau politique et le niveau administratif
Cette évolution nous semble marquer un pas de plus dans une voie qui renforce la confusion entre le niveau politique et celui de l’administration. Cette évolution aura de fortes conséquences sur les personnels de direction et notamment les chefs d’établissement, représentants de l’État. Nombre de gouvernements voudraient accroître la confusion représentant de l’État/représentant du Ministre. Cette distinction n’est pas neutre : une réforme est-elle à promouvoir avant sa promulgation législative et réglementaire ? ou à mettre en œuvre dans le cadre défini par la Loi et les Règlements en vigueur ? La réponse apportée à cette question est lourde de conséquences pour nos métiers, nos fonctions.
Nous pouvons renforcer cette réflexion, par l’arrêté publié le 3 août 2021 sur les nouvelles modalités du concours de recrutement des personnels de direction qui indique que les candidats seront évalués sur « les compétences managériales du candidat ainsi que son aptitude à mettre en œuvre des réformes. » Une autre formulation aurait pu être celle de l’accompagnement du changement, de l’innovation, mais non… « mettre en œuvre des réformes ». Quel type de candidats le ministère veut-il recruter ?
Des principales missions de l’Inspection Générale à….
Quelles sont les principales missions de l’Inspection Générale ?
Prenant comme source la page de présentation du site du ministère de l’Éducation Nationale, l’Inspection Générale assure des missions d’évaluation, d’expertise, de contrôle et d’appui.
Rappelons que les inspecteurs généraux sont actuellement des fonctionnaires, tenus de ce fait aux principes de la Fonction Publique dont celui de neutralité. Ils étaient de plus inamovibles. Ces deux éléments constituaient un très fort gage d’indépendance au politique.
… la réforme de celle-ci
Que prévoit la réforme de l’I.G. ?
La disparition du corps des Inspecteurs généraux pour le remplacer par des emplois fonctionnels à durée déterminée. Il ne faut pas être grand clerc pour percevoir la mainmise du politique sur ces emplois. Comment alors remplir avec impartialité et toute la neutralité nécessaire les missions d’évaluation des politiques publiques et de conseil au gouvernement actuellement dévolues au corps des I.G. ?
Certes le système actuel n’était pas parfait et un certain nombre d’inspecteurs généraux ont été nommés non pour leurs compétences mais pour « recaser » d’anciens membres d’un gouvernement, parlementaires… Ce système devait être réformé dans une orientation apportant plus d’indépendance au politique, plus de transparence dans les nominations. Les dérives observées ne peuvent servir de prétexte à une contre-réforme qui abolit de fait l’indépendance de l’Inspection Générale et renforce son lien au politique.
Cette contre-réforme dont la mise en œuvre est prévue pour 2023 constitue un nouveau recul du principe de neutralité, principe fondamental des fonctions publiques. Dans les temps politiques mouvementés et incertains que nous connaissons, il est d’autant plus important de les préserver.
Nous ressentons tous dans nos fonctions différentes formes de pression autres que celles de l’exigence du service apporté aux élèves et à leur famille : pression de la hiérarchie, opacité des opérations de gestion, injonctions, déréglementation, mises en concurrence des EPLE et des personnels, …
Neutralité, continuité de service, égalité de traitement
Dans le système Fonction Publique, nombre d’éléments ont été construits, notamment dans la période 1944 – 1985 pour s’assurer de l’effectivité de ses trois principes fondamentaux : neutralité, continuité de service, égalité de traitement.
Nous ressentons vivement la remise en cause de ces principes fondamentaux, les conséquences tant pour les usagers que pour les personnels sont déjà prévisibles.
C’est pour contrecarrer ce démantèlement progressif de la Fonction Publique que nous devons nous mobiliser pour que l’Inspection Générale renforce son indépendance et soit confortée dans ses missions au bénéfice du développement des Services Publics.
Tel n’est pas le cas de la contre-réforme engagée par le Gouvernement à laquelle nous nous opposerons.
Igor Garncarzyk
Secrétaire général du snU.pden-FSU