Grand débat : en attendant l’oracle

Grand débat né dans la douleur : il aurait dû être piloté par la Commission Nationale du Débat Public (CNPD) mais sa présidente y a renoncé suite à une polémique sur son traitement.  Toutefois, elle avait déclaré fin janvier 2019 : « On n’est pas dans un grand débat, on est dans une consultation… Quand vous procédez uniquement par un questionnaire, en réalité, la réponse est déjà faite, le débat est faussé ».

Le Président de la République a persévéré dans son choix d’un questionnaire verrouillé. Choix dénoncé lors de la restitution du 8 avril,  par une des garantes qui a regretté les formulations « binaires » de certains questionnaires.

Les participants :

Après observation de plus de 200 débats en France, le Cevipof a constaté que ce  sont majoritairement des hommes (55 %), 65 % diplômés de l’enseignement supérieur, âgés (60 ans en moyenne), retraités (50 %) et actifs de plus de 50 ans (34 %), propriétaires de leur logement (75 %) qui participaient. Il est ainsi difficile d’affirmer que les participants représentent la société française. Situation rappelée par Nadia Bellaoui, l’une des 5 garants : « l’objet du grand débat n’était pas de réaliser un sondage représentatif de la société française. »….  « Nous savions très bien depuis le début que cet exercice n’attire qu’une partie de la population ».  

La présentation du Premier ministre :

Après traitement informatique par divers organismes dont Opinionway, la synthèse du Grand Débat a été remise au gouvernement.

De celle-ci, lors de sa présentation au Grand Palais, le Premier ministre a retenu plusieurs exigences : exigence fiscale, exigence de fraternité, exigence démocratique et urgence climatique.

  • Exigence fiscale : il a déclaré : «  c’est en fait une immense exaspération fiscale. Notre pays a atteint une sorte de tolérance fiscale zéro. Les débats nous indiquent clairement la direction à prendre : nous devons baisser, et vite, les impôts »  Cette annonce de baisse des impôts va à contre-courant de ce qui était réclamé : plus de justice fiscale, rétablissement de l’ISF, baisse de la TVA sur les produits de première nécessité… De plus elle entraînera une baisse de la dépense publique avec pour corollaire une baisse de l’action publique indispensable à la cohésion sociale.
  • exigence de fraternité il a annoncé : « Nous devrons revoir nos règles d’urbanisme, réadapter nos services publics pour qu’ils redeviennent des services de contact. » Fallait-il attendre le grand débat pour découvrir que la casse des services publics est mal vécue sur le territoire ? Comment persévérer dans la suppression des hôpitaux de proximité, des maternités, des services fiscaux, de la Poste… ?
  • exigence démocratique : il propose de « construire les outils d’une démocratie plus délibérative » et de « bâtir une démocratie participative au long cours. » Quelle démocratie quand les organisations syndicales sont méprisées, quand les acteurs de terrain ne sont pas entendus ? Quel crédit accorder à ce propos ?
  • urgence climatique, selon les propos du Premier ministre, les français ne seraient pas climato-sceptiques mais « ne veulent pas que des taxes leur dictent ce qu’ils doivent faire »

La prestation du Premier Ministre n’a finalement rien annoncé de tangible si ce n’est de tenter de laisser penser que majoritairement  nos concitoyens ne veulent plus payer d’impôt puisque c’est cette petite musique qui est relayée par des ministres et des élus de LREM. Il  reste à attendre la voix de l’Oracle : le Président de la République.

Pour le snU.pden FSU, l’analyse faite par le Premier ministre ne répond pas à l’attente de nos concitoyens, gilets jaunes ou pas.

L’exigence d’une réponse à la crise sociale, d’équité fiscale, d’un véritable dialogue social, de revalorisation des salaires,  des pensions, des prestations sociales, de meilleures conditions de travail…  pour tous restent d’actualité. Les personnels de direction le rappelleront avec force aux côtés des autres fonctionnaires lors de la journée du :

 9 mai prochain à l’appel de l’intersyndicale de la Fonction Publique.

Paris, le 10 avril 2019

Le bureau national