Un vent de rébellion dans l’Education Nationale

Depuis le 2 novembre, une rébellion monte dans les établissements. Des mouvements s’organisent, motivés par un vent de colère et de révolte, y compris chez les chefs d’établissement qui se sont sentis salis par la décision du ministre de revenir sur la parole donnée alors que pendant les vacances scolaires, les équipes de direction avaient travaillé main dans la main avec les enseignants pour préparer l’hommage à Samuel Paty. Bon sang ! Un prof tué, décapité dans l’exercice de ses fonctions, ça ne valait pas la peine de permettre à la communauté de se retrouver, d’échanger ? Au lieu de se limiter à une lecture et une minute de silence pour remettre l’essentiel à plus tard ? Le vendredi 16 octobre restera dans les livres d’histoire. On le sait tous.

Jean-Michel Blanquer a brutalement sifflé la fin de partie et renvoyé l’hommage à plus tard. Pour ne rien arranger, il a adressé aux établissements une version tronquée du texte de Jean Jaurès critiquant le « système » et pouvant faire écho à certains des griefs formulés par les enseignants contre le gouvernement actuel.

Des équipes de direction rappelées à l’ordre

Certaines équipes de direction avaient prévu de différer l’accueil des élèves au mardi ; elles ont été fermement rappelées à l’ordre par des Dasen, les contraignant à reprendre les élèves dès 8h du matin. Que s’est-il passé dans ces établissements ? Les enseignants désabusés, désorientés, accablés, parfois très en colère se sont mis en grève pour organiser ce temps d’accueil nécessaire pour les élèves. Nous savons également que des collègues chefs d’établissement se sont également mis en grève, en s’appuyant sur le préavis de la FSU. Pour eux, la décision du ministre mettait en effet à plat tout un travail de fond organisé et planifié par les équipes, confrontées à des contestations régulières de la laïcité, à la montée de la radicalité.

Finalement, il faut le dire, la rentrée s’est bien passée quand les chefs d’établissement ont pris sur eux et désobéi au ministre ! La gestion actuelle du ministère et les déclarations sur les radios et chaînes de télévision font désormais office de bulletin officiel. Cela devient même un jeu de piste que de suivre ce que Jean-Michel Blanquer déclare ici ou là. Parce que d’un moment à l’autre, il peut aussi changer d’avis, se contredire, ou bien être contredit par le premier ministre, comme sur le port du masque pour les enfants de 6 ans.

Le retour à la culture de l’instruction écrite, une nécessité

Disons-le simplement : nous sommes inquiets de cette dérive. Le retour aux instructions écrites est nécessaire. Quand le ministre déclare que les stages de 3ème deviennent facultatifs, mais que ce n’est écrit nulle part, que sont censés faire les chefs d’établissement ? Cette manière de piloter le ministère casse l’autorité hiérarchique et brise une à une les normes en vigueur. Plus personne ne sait ce qui est vrai, ce qui fait réellement foi. Nous considérons que c’est préjudiciable et dangereux pour le système lui-même.

La polémique entretenue par Jean-Michel Blanquer sur les dérives « islamo-gauchistes », l’incapacité pour les établissements de mettre en œuvre le protocole sanitaire par le choix actuel des priorités gouvernementales, les dérives autoritaires observées dans la société, entretiennent un climat malsain dans la société. Tous ces éléments construisent peu à peu une inquiétante fêlure de la société.

Bobigny, le 6 novembre 2020

Samuel Lautru, secrétaire national-adjoint, pour le bureau national